Discussion : La piste d'envol d'Eris

Sephiroth se fendit d'un très large sourire. Cette fille avait vraiment des manières particulières mais très amusantes. Il lui posa son bras sur les épaules et exerça une légère pression.

- C'est vrai que tu n'as pas dit qu'on était un couple. Je me suis fait avoir je crois bien! On a qu'à dire qu'on est un duo.

- Mais t'as pas peur qu'on te le pique ton général?

-Je te taquine laisse tomber. Tu viens m'aider à surveiller le ballon?

Il l'entraina ensuite à l'extérieur du havre, jusqu'à la piste d'envol où le ballon était stationné. Les gardes y étaient toujours présents, froids comme un pan de marbre. Ils laissèrent le duo passer jusqu'à la nacelle dans laquelle le Néphilim s'assit. Il invita Elsa à le rejoindre en face de lui. Il fit semblant de prendre un air sérieux pas du tout convaincant, juste avant de laisser échapper un petit rire.

- Allons y. Je suppose que tu veux savoir ce que je suis? Et bien un Néphilim. Ma mère était une Diablesse, nommée Jenova. Mon père un humain quelconque avec qui je n'ai eu que très peu de rapports. C'est ça qui explique les ailes et l'épée. Et deux trois autres choses.

- Ca pose déjà quelques bases si tu veux orienter tes questions. Qu'est ce que je peux donc t'apprendre? Et surtout... J'y gagne quoi?

Son sourire revint lors de la dernière tirade, accompagnée d'un clin d'oeil de la part du demi-diable.

Sephiroth gardait son sourire accroché aux lèvres. Ses yeux brillaient, et si le soleil avait pu toucher Ordann, nul doute que ces pupilles auraient éblouit la jeune femme de leur éclat. Il se laissait faire par l'audacieuse guerrière qui se prenait au jeu en passant le bras autour de sa taille. Il n'allait pas se plaindre de sa condition.

- Trouver l'amour n'est pas chose facile. Il faudra qu'il s'accroche parce que le chemin est long et semé d'embûches. Certains disent qu'il faut que le coeur soit brisé une fois avant de trouver ce qu'il cherche. D'autres ne le trouvent jamais. Les derniers l'ont perdu définitivement. Il faut d'abord accepter tout ça. Tu crois qu'il y arrivera? Question bête : tu me diras que si tu n'y croyais pas tu ne l'aurais pas suivi.

- J'ai très peu connu mon père parce que le temps de gestation des diablesses s'étale sur plusieurs années. Je ne lui ai parlé que quelques fois, entre deux batailles. Je l'ai vu vieillir et mourir paisiblement dans son lit lors de mon 15ème anniveraire à peu près. Ma vie était une guerre incessante, et les souvenirs que j'avais de lui se sont peu à peu estompés, jusqu'à ce qu'il ne me reste que quelques bribes. C'était un bûcheron nommé Bob, trouvé par hasard par ma mère. Je crois qu'elle aimait ses bras très musclés. Peu importe.

- Tu n'as pas croisé beaucoup de Néphilims non? Tu ne savais peut être même pas que mon peuple existait. Et de mon coté, j'ai pris quelques "vacances". Depuis je suis sorti de ma retraite il y a quelques jours, on va dire que je découvre un nouveau monde. Donc, je ne sais pas si ma mère est encore en vie. Ou même si elle est encore sur ce plan.

Il replaça ensuite avec son bras disponible une mèche de cheveux qui retomba immédiatement sur son visage.

- Gagner une amie? J'en demandais pas tant! Je voulais juste en savoir un petit peu plus sur toi moi aussi. Que tu te livres un peu.

Il pouffa et retint un éclat de rire.

- Haa. Je ne regrettes pas de m'être réveillé maintenant moi! Ca fait un petit moment que j'arpentes ces terres, et jamais Ô grand jamais on ne m'avait dit que je m'approchais de la perfection. C'est ma mère qui serait fière!

- Mais... tu as dit "belles femmes", tu avoues donc que j'ai du goût. Ou que tu partages les miens.

- Rassure-toi, je suis loin d'être la perfection. Par exemple je ne vais pas te dire s'il y a quelqu'un dans ma vie.

Il éclata de rire cette fois et prit un petit air et une voix de "lover"

- Il faut bien que je reste mystérieux non?

Il finit de rire avant de replonger son regard sur Elsa.

- Non, il n'y a pas de "diablesse" qui m'attende quelque part. Ou alors elle ne m'a pas prévenue et je risque de me faire rouster en rentrant.

- Je suis ravi de satisfaire ta curiosité. Ca fait des années que je n'avais parlé avec personne. Alors si en plus c'est une jolie guerrière comme toi je ne vais pas laisser passer ma chance n'est ce pas?

Il avait avancé sa main lentement, délicatement jusque sous le menton d'Elsa pour orienter le regard de la rousse dans le sien. Il souriait toujours, avec la même intensité, avec les mêmes étoiles dans les yeux.

Sephitoth ne perdait toujours pas son petit sourire et il écoutait toujours avec attention les paroles de la jeune femme.

- Je ne sais pas si Ordann a besoin de gens comme lui, mais en tout cas ce serait bien que la petite princesse ne nous le sèche pour un chagrin d'amour. Ce serait vraiment bête pour lui. J'espère tout comme toi que ça se passera bien.

Puis il fit une mine un peu surprise, confuse.

- Dragueur invétéré? Tu n'y va pas avec le dos de la cuillère dis donc. Je suppose que je le mérite après tout.

- Ce que je veux savoir sur toi?... Et bien déjà, quelque chose que tu acceptes de me dire, donc rien de très indiscret. On va faire classique; d'où tu viens je le sais, mais pourquoi avoir choisis la voie de l'épée? Les humains ont tous des raisons qui les poussent à prendre les armes, des raisons souvent bien plus compliqués que chez les autres races.

- J'ai combattu pendant des années, puis j'ai été prisonnier de guerre puis vendu. J'ai été libéré il y a une semaine à peu près, après 150 ans de captivité environ. Il faudra m'excuser, mais j'ai un peu perdu le compte de mes années, mais je dirais que je dois avoir dans les 650, 700 ans. Tu vois, ma vie n'est pas si compliqué que ça après tout.

Il eut ensuite un petit regard triste avant de détourner les yeux d'Elsa et de les fixer vers les nuages.

- Pour ma vie sentimentale, je sais ce qu'est l'amour parce que je l'ai perdu définitivement. C'est là que ma vie devient compliquée. Mais c'était il y a longtemps, et je ne sais pas si tu as vraiment envie de m'écouter en parler. Ce n'est pas indiscret, mais ça peut te barber, donc si tu veux que j'en parle, j'en parlerai, sinon j'attendrai d'en savoir plus sur toi.

Le corps du Néphilim n'avait pas bougé d'un iota, juste sa tête avait pivoté pour rester maintenant bloquée sur les cieux, sa main toujours sous le menton d'Elsa.

Sephiroth se retint une nouvelle fois d'éclater de rire. Mais son sourire en disait long: la réaction de la jeune femme l'amusait.

- Traite moi de vieux tant que t'y es!! D'un autre côté, je ne peux pas te dire le contraire, j'ai pas mal vécu du point de vue d'un humain.

- Le temps n'a pas d'emprise sur mon corps, non. Je vais te montrer pourquoi.

Avec sa main libre, Sephiroth sortit la lame d'Elsa d'environ une trentaine de centimètres. Il fit cela très doucement et très délicatement pour que la jeune femme comprenne facilement qu'il n'allait pas l'agresser. Il s'entailla le poignet, à l'endroit exact où un suicidaire se taillade les veines pour être sûr d'y rester. Puis il tendit le bras pour qu'Elsa puisse bien le voir. Un filet abondant de sang se répandait par la fin entaille, mais après quelques secondes, cela s'arreta. Puis la plaie commença à se refermer .

- Dans quelques instants il n'y aura plus rien. Donc je te donne un conseil. Si tu veux me tuer, tue moi d'un coup ou tue moi vite.

- C'est grâce à ces facultés que mon peuple a servi pour la guerre. J'ai combattu des siècles durant et puis maintenant... je crois bien que cette période est révolue. J'ignore pourquoi, mais c'est un fait. La preuve, c'est que tu ne connaissais même pas l'existence de mes semblables. Nous n'étions que les protecteurs des Shamirs après tout.

- Tu vois donc que nos vies se ressemblent, nous vivons par les armes et pour les armes. Sauf que toi tu as un but. Moi je ne l'ai plus. Ta vie est donc bien plus qu'un simple grain de poussière, elle est pleine d'avenir. Moi... Je ne suis qu'un homme préhistorique très mignon et dragueur qui essaye de se faire une place maintenant.

- Et pour ta gouverne, sache que l'écriture existait déjà lors de ma naissance, donc préhistorique, t'exagères un peu. Mais cela a vraiment trop peu d'importance.

Petit à petit son sourire s'évanouissait, jusqu'à complètement disparaitre. Son regard se fixa à nouveau vers les cieux, et un air incroyablement mélancolique assombrit son visage.

- Elle s'appelait Nika, une humaine qui ne devait pas être beaucoup plus agée que toi. Des grands yeux noisettes avec des cheveux chatains qui bouclaient sous ses épaules. Une peau douce, une odeur de fleurs. Une vrai perle. Je l'ai connu par hasard, lors d'une période de repos. Elle n'avait pas peur de moi et cranait dans son bled, mais elle avait un petit quelque chose d'adorable. Je savais que je n'aurais rien d'exceptionnel à faire pour les quelques années à venir, aussi je me suis entiché de cette fille.

- Elle voulait tout voir, tout faire, tout savoir. C'était une charmeuse professionnelle, elle avait des mimiques qui auraient fait fondre n'importe qui. Je commençais à m'habituer à ça, presque jusqu'à en devenir casanier! Mais j'ai vite appris que de telles choses ne sont pas faites pour durer. Vigrid et quelques autres m'ont trouvé. J'étais partit lui chercher des fleurs qu'elle adorait quand il lui sont tombés dessus. Pour te passer les détails, ils m'ont juste mis en face d'elle après m'avoir attrapé.

- Ils l'ont torturé pendant trois jours. Mes bras et mes jambes étaient percés par des pieux en métal qui me maintenaient sur le mur de chez Nika. Je ne veux pas le vérifier, mais mon sang doit encore être sur les pierres malgré tout ce temps. Vu ce que tu as vécu, je ne vais peut être pas te donner tous les détails, encore une fois. Ils finirent par partir, en la laissant pour morte. J'entendais son souffle s'éteindre alors que j'essayais de me libérer.

- Quand j'ai enfin pu ramper jusqu'à elle, j'ai entendu ses derniers mots. Elle m'a dit en souriant que ces dernières années avaient été les plus belles. Ce fut la dernière chose qu'elle dit. Et c'est à cet instant que j'ai réalisé ce qu'était l'amour, et le sentiment que cela faisait de le perdre à jamais.

- J'ai brulé son corps et dispersé ces cendres au gré des vents, au sommet d'une montagne. Je me suis dit qu'elle pourrait encore voir le monde comme ça. C'était tout le mal que je pouvais lui souhaiter.

La voix du Néphilim n'était pas tremblante, mais elle n'était plus enjouée. Elle était redevenue neutre. Il fixa les nuages encore quelques secondes, immobile dans le vent qui mourait sur son visage. Puis il se retourna vers Elsa.

- C'est le passé maintenant. Ce qui est fait est fait.

Le Néphilim se laissait faire sans piper mot. Lui aussi avait rivé son regard dans la couche de nuages, et il n'en bougea pas lorsque sa tête vint heurter doucement l'épaule armurée d'Elsa.

- Un avenir tout rose? Pourquoi pas... Dans ce cas tu as mal choisi ton camp, ce sont les Héphilims qui maitrisent la magie de la Lumière. S'ils s'y mettent tous ca devrait pouvoir le faire.

- Je plaisante, mais je vois ce que tu veux dire.

Il soupira longuement avant de continuer. Sa voix restait tout aussi neutre qu'avant.

- Et bien tu vois, le monde auquel j'aspire à l'heure actuelle est une bataille sans fin. Et ma place serait bien sûr en première ligne. Je te l'ai dit, je suis né par les armes et pour les armes.

- C'est triste n'est ce pas? D'autant plus que ce n'est pas bien difficile à atteindre à première vue.

- J'aurais pu dire que je souhaiterais me refaire une vie bien tranquille, mais je ne vois pas pourquoi. J'ai déjà gouté à cette vie là.

- Une fuite en avant tu me diras... Et tu as tout à fait raison. Mais c'est ainsi, je ne sens pas le besoin de vivre dans un monde rose, un rouge sang m'irait tout aussi bien.

- Ce que je dis est horrible et j'en suis conscient. J'ai eu le temps de me poser toutes ces questions pendant mes vacances au Foyer. Pour l'instant, c'est cette décision qui en ait ressortie.

- Je ne dis pas que je ne changerais pas d'avis bien sûr, il faut juste que je trouve une bonne raison, c'est tout...

Encore une fois, il n'avait pas bougé. Il faut croire que l'immobilisme était aussi une de ses marques de fabrique. Il n'était pas vraiment froid juste... qu'il ne bougeait pas. Seules ses cordes vocales vibraient, ses paupières ne clignaient même pas, le vent ne le décoiffait plus, protégé qu'il était dans les bras de la guerrière.

Sephiroth regardait toujours dans le vide, il n'avait pas encore vu les yeux de la jeune femme qui lui tenait compagnie.

- Pas facile? Bof... Tu sais, on apprend à relativiser avec le temps. Je me dit que ça n'aurait pas pu se passer autrement de toute façon. Comme je te l'ai dit, le passé est le passé.

- Mais tu as raison, nous devons profiter de ces moments de calme que nous vivons, ils ne dureront surement pas. Je te rappelle que je suis un mercenaire maintenant.

- Je suis désolé si j'ai un peu étouffé ta curiosité sur le coup. Mais tu ne dois pas être triste pour moi tu sais. Je ne le vis pas si mal que ça. J'ai eu le temps de faire mon deuil sur tout ça.

- Et puis, pour dire que nous passons un bon moment, il faut que pour toi aussi ce soit agréable. Car pour moi...

Il retrouva son sourire. Une sourire qui annonçait très clairement qu'il allait dire une bêtise.

- Je dirais que je suis "aux anges"!

Et il éclata d'un grand rire qui fit résonner la nacelle du ballon.

Sephiroth était toujours souriant en voyant Boris arrivait. Il l'écouta, d'un air très sérieux.

- Ne t'inquiète pas Boris. Je te ramènerai tous les doigts qui se seront posés sur ce ballon sans ta permission!

Puis il regarda Elsa dans les yeux, mais s'adressait à Boris pendant que celui-ci tirait sa révérence.

- Bon, je te l'ai pas demandé, mais je considère qu'Elsa et moi on a le droit, ça me ferait mal de couper de si jolis mimines.

En fin d'après-midi, Cael arriva au ballon.

- Salut Sephiroth, tu sais où je peux trouver les autres ? Ils sont pas à la taverne, tu crois que Boris a des problèmes ? ajouta-t-il en plaisantant.

Sephiroth était toujours en position détendue, sa voix toujours très calme répondit à Cael.

- Hein? Ils sont plus à l'auberge?

- Ah oui, c'est vrai, Boris est passé. Il m'a dit qu'ils étaient dans la maison la-bas, au loin, tout au nord ouest des faubourgs.

- Et qu'il fallait le rejoindre, mais comme ça me concerne pas, j'ai un peu oublié tout ça.

- Je ne sais pas s'il a des problèmes, ca en avait pas l'air tout l'heure...

- Mais sois prudent

- Merci, bon ben je vais y aller alors.

- A demain sans doute.