Pendant les 3 ans ... Tyrion

L’inclinaison de la lumière à travers les frondaisons t’indiqua que le soleil avait entamé sa course vers le couchant dans la Grande Foret d’Erethor. Tu regardas la cime des arbres avec un soupir. Ce n’était pas encore aujourd’hui que tu trouverais ces fichus Veilleurs…Voilà déjà plusieurs mois que tu parcourais la Caraheen à leur recherche, en vain. Tu avais remonté seul les jungles luxuriantes de l’Aruun et les marécages pour atteindre la Caraheen, le Cœur de la Grande Forêt. C’était la fin de l’été et peu à peu, l’humidité ambiante, suffocante, avait fait place à une douce chaleur. Puis aux cendres. Des jours durant, une pluie de cendres, disparate mais régulière, avait accompagnée ta route. La Ligne de Feu, le front de la guerre apporté par le Dieu Sombre, n’était pas loin. Sans véritablement t’approcher, tu longeas cette ligne dans l’espoir de trouver ceux que tu voulais contacter. En vain. Ces damnés Veilleurs étaient plus discrets que les esprits du Murmure. Impossible de les voir, ni de les entendre. A peine captais-tu un instant un bruit de feuille froissé au-dessus de toi -cela aurait bien pu être le vent- ou un jeu d’ombre insolite sur les troncs ancestraux. Etaient-ils vraiment ici ? Existaient-ils vraiment ? Les Veilleurs n’étaient-ils pas une légende elfique, destinée à redonner du courage aux défenseurs d’Erethor et semer le doute chez les élus d’Izrador ?
Les orques eux, par contre, étaient aisément décelable. Des patrouilles, visiblement les nerfs à vif, exploraient l’immensité de la forêt primordiale. Ils paraissaient minuscules et terriblement vulnérables au milieu des chênes et des séquoias plusieurs fois millénaires. Leurs faciès plissés trahissaient une angoisse visible, et le moindre bruissement du vent dans les feuillages les faisaient grogner de défi vers des assaillants imaginaires.
Ce fut l’une de ces patrouilles qui t’apporta ce que tu étais venu chercher. Te tirant brusquement de tes réflexions, des bruits étouffés t’alertèrent. Des bruits de pas. De lourdes bottes foulaient le tapis de feuille de la forêt. Tu juras en silence contre ton inattention et tenta de trouver une échappatoire. Ici, la végétation était assez clairsemée et il aurait été possible pour un œil exercé de repérer ta course parmi les troncs. Préférant écarter tout risque que l’on te voit, tu t’enveloppas dans ta cape, devenant invisible. Un groupe d’orque déboula entre les buissons. Ils portaient l’équipement léger d’un peloton d’éclaireurs. Bien que marchant en silence, les cliquetis de leurs broignes, le bruit de leurs foulées puissantes et l’expiration de leurs souffles rauques faisaient un tintamarre aisément décelable pour une ouïe elfique…
Alors que le premier orque approchait à quelques mètres de toi, une dizaine de traits tombèrent des frondaisons pour cueillir les élus d’Izrador. Les flèches se fichèrent dans les gorges découvertes, les yeux, les têtes non protégées. En un instant, leurs cris de surprise résonnèrent dans la Grande Forêt. Les quelques survivants, blessés, se ruèrent à couvert. C’était exactement ce que les Veilleurs attendaient d’eux. Trois elfes surgirent pour leur barrer le passage. En quelques passes d’armes aériennes, ils couchèrent leurs adversaires sur l’humus de la forêt. Le combat n’avait duré que l’instant de quelques battements de cœur. L’un des elfes fit signe aux deux autres d’inspecter les cadavres tandis qu’il rangeait sa lame au fourreau. Scrutant les alentours, il cria d’une voix musicale :

- Frère, êtes-vous encore là ?