[Discussion privée] : Le rêve des trépassés

La nuit était calme. Ou du moins pourrait l'être pour le havre des Salines si l'un des pensionnaires de la Sirène Bleue ne faisait pas trembler les murs à chaque ronflement. Ces compagnons de chambre ne semblaient pas s'en offusquer, certains étaient même habitués. Sephiroth toujours debout avait une mine amusée.

Mais pour l'auteur de ces ronflements, Boris l'increvable, le sommeil n'était pas aussi serein que ce qu'il aurait voulu. Sur Ordann, le monde des rêves n'est pas vraiment un refuge...

Boris se retrouvait dans sa tenue habituelle, sa tenue de combat, bouclier et poing bien en place il était prêt. Mais aucun couloir à l'horizon. Enfin, horizon, derrière lui, seul du noir et des infectieux figés dans le temps, immobiles. Derrière lui, un escalier qui descendait. Le décor était très sobre, en dehors des morts vivants il n'y avait rien d'autre que l'escalier. Pas de ciel, de plafonds, de murs ou de sols... La route était claire.

Le jeune guerrier descendit les marches. Jeune? Boris a déjà pas mal vécu, comme se sentait il si jeune? L'escalier n'était pas long, pourtant le descendre était si long...

Au pied de l'escalier, du sang. Du sang qui avait giclé dans plusieurs sens, probablement de plusieurs personnes différentes, mais pas de traces de corps. Juste quatre fantômes qui flottaient là. Des fantômes? Et comment pouvait il se sentir aussi tranquille avec des être surnaturels à quelques mètres de lui? Puis il les reconnut: Ciaerh, Werner, Failent et Kraid eux aussi vêtus de leurs tenus de combats.

Mais leurs vêtements étaient lacérés et ils marmonnaient. Werner vint instinctivement voir Boris et lui adressa un sourire.Qui peut se targuer d'avoir un fantome qui lui ait souri, même en rêve. Une voix spectrale parla, rien à voir au filet de voix de Werner de son vivant.

- Hé bien Boris? Nous attendions depuis un moment que quelqu'un vienne, je n'aurais jamais cru que ce soit toi qui soit le premier. Enfin, toujours est il que nous t'avons expliqué la situation. Nous comptons sur toi. Mais nous ne savons rien sur Sieg et Richard. Je te conseille la prudence. Et sache que tu pourras compter sur nous, par delà notre mort!

- Mais prends garde... Prends bien garde à toi... Et sois informé surtout! Nous t'avons embarqué dans quelque chose de dangereux parce que nous comptons sur toi, comme autrefois. Mais la chance ne fut pas des nôtres cette fois là, et avec Dasilass il faut être prêt à tout. Que sais tu à son sujet?

Boris baissa la tête.

- Vous ne m'avez embarqué dans rien du tout, mes vieux amis. C'est moi qui ai failli. J'ai pensé mettre fin à ma vie quand j'ai réalisé que j'étais le seul survivant. Mais ma mort aurait été inutile.
J'ai décidé de vouer ma vie à la protection de mes compagnons, dans l'espoir d'une rédemption.

Il serra le poing.

- Si j'avais su ce qui vous est arrivé... mais ça ne sert à rien de s'apitoyer sur le passé. L'essentiel est que Sieg et Richard ont besoin de moi, et que seule la mort pourra m'arrêter. C'est une bonne raison de mourir, non ?

Le mercenaire s'assit nonchalamment sur l'avant-dernière marche de l'escalier.

- Je ne sais pas grand chose sur Dasilass. Nous avons eu affaire à un de ses sbires, un type étrange mais très puissant. Cela dit, je sais de qui en apprendre plus. Si nous devons l'affronter, nous devons être prêts. Foncer tête baissée ne marchera pas cette fois-ci. Tu as raison, il me faut toutes les données en main pour monter un plan.
Et toi, que sais-tu sur lui ?

La voix éclata d'un grand rire. Un rire qui ne trompait pas Boris, il reconnut celui de Werner sans l'ombre d'un doute.

- Tu avais déjà ce raisonnement de vieux crouton à ton jeune âge. Mais bordel, tu devrais avoir envie de vivre non? Pour toutes les donzelles qui méritent une étreinte, pour les combats qu'il te faut remporter et fêter dans la bière!! Si tu protèges tes compagnons, c'est pour qu'ils vivent et toi aussi!! Parce que c'est ça la vie!! Nous nous sommes morts. Enfin...un état diférent de la mort, je ne saurais le définir. Nos corps sont encore en état de fonctionner mais... nous ne les contrôlons plus. Ahhhhhhh! J'enrage de ne pouvoir leur faire cracher leurs tripes!

Ciaerh passa devant Werner et lui posa délicatement sa main sur le torse.

- Calme toi Werner, l'heure n'est pas à cela. Boris, je suis content de te savoir vivant. Il faut nous pardonner notre faiblesse passé, car désormais, c'est cela qui t'attriste. Si tu veux des renseignements sur Dasilass, sache que c'est une femme. Mais un vrai démon. Elle vit loin au Sud est, dans les marais. Mais élaborer un plan pour l'attaquer est impossible. Elle est dans une forteresse blanche et remplie d'esclaves. Tu y perdrais la vie. Non, nous ne te demandons rien de cela. A la place, pourrais tu détruire nos corps? Ainsi nos consciences seraient apaisées.

- Et il faut aider Sieg et Richard aussi!!

- Oui, c'est un service que nous te demandons, au nom de tous ces bons moments passés ensemble.

- Bah, je devrais déjà être mort ce jour-là. Ou même le jour où j'ai fui en laissant le havre ravagé par les infectieux. Chaque jour n'est qu'un sursis de plus, que je peux utiliser pour tenter de sauver plus de vies que celles que j'ai abandonné.

Sourd aux avertissements, Boris imaginait déjà un plan pour vaincre Dasilass.

- Hmm, je vois. Nous devrons ronger son armée petit à petit avant de pouvoir l'atteindre. Mais elle gardera toujours une armée pour la protéger. Nous aurons besoin d'une diversion... mais commençons par vous libérer, ainsi que Sieg et Richard. Ce service je l'honorerais au péril de ma vie s'il le faut, en mémoire de toute ce que l'on a vécu.
Vous savez où sont vos corps ?

L'apparition de Ciaerh continuait de parler tranquillement, doucement, comme il en avait l'habitude. Cet homme avait toujours étonné Boris; il était d'une gentillesse hors norme en dehors des missions, mais une fois qu'il tirait son épée à deux mains, il la faisait danser en souriant au milieu d'un ballet d'organe.

- On ne devrait pas dire ce genre de choses et tu le sais très bien Boris. Nous sommes heureux que tu ai pu t'en tirer, n'en doute pas. Tu as la chance d'être en vie et profites en, c'est aussi notre credo.

- Mais ne cherche pas à te venger d'un adversaire aussi puissant. Défaire une armée? Tu es bien courageux et bien patient je trouve.

- Nous ne savons pas où sont nos corps à l'heure actuelle. Nous avons supposé qu'ils avaient été emmenés dans le repaire de Dasilass, quelque part dans les marais de Doomstalk. Mais c'était il y plusieurs années il me semble. Tu sais que le temps n'est plus trop un problème pour nous, nous avons peut être perdu cette notion.

Boris montra les dents dans un sourire carnassier.

- Hé, donc quoi que vous en disiez il va falloir se rendre là-bas. A moins que l'on n'arrive à obtenir plus d'informations en chemin. Dans tous les cas, direction les marais.
Bien, je vais vous présenter à mes compagnons.

Ciaerh et les autres sourirent.

- C'est mignon comme tu t'occupes de nous. Mais nous t'en remercions grandement Boris, nous n'en demandions pas tant. Come toujours tu es une tête de mule. Et si mes souvenirs sont bons, je pense que tu dois empecher tes compagnons de dormir. Tes ronflements sont aussi puissant qu'une machinerie gnome!

Puis Boris sombra à nouveau dans un sommeil profond et sans rêves jusqu'à ce qu'un coq vienne le tirer de son lit