le sanctuaire d'Esus

Kronos Jeu 2 Oct - 9:30

A une distance respectable de l’immense porte de pierre, Randall Morn se déplaçait prudemment entre les squelettes des légionnaires Hobgobelins. Les vestiges des armes et des armures des guerriers morts avaient révélé qu’ils appartenaient à une unité d’élite. Il ignorait pour l’instant laquelle, n’ayant pu retrouver une pièce de tissu révélatrice ou le squelette d’un officier parmi tous les ossements.

Mais Randall Morn ne désespérait pas pour autant. Ces recherches ne faisaient que commencer et ce sanctuaire, si s’en était bien un, recelait beaucoup de surprises.

La première avait été la présence des deux fresques. Immenses peintures murales, rongées par la moisissure, elles accentuaient la noirceur des lieux et perturbaient profondément les personnes présentes dans la pièce. Leur regard était constamment attiré par l’immense porte de pierre et ce qu’elle recélait.

Deux de ses apprentis avaient commencé à reproduire les fresques. Assis en tailleur, face à celle de gauche, Simon, un jeune garçon à peine sorti de l’adolescence, dessinait d’une main experte un des immenses Ur-vils, créatures cornues à l’allure simiesque et à la peau noire comme la nuit. Randall Morn savait peu de choses sur elles. Lors de ses précédentes expéditions dans le sud, il avait trouvé d’autres représentations de ces créatures et en avait déduit qu’elles étaient des sortes de lieutenants dans les armées du Dévoreur.
La fresque les représentait conduisant une armée de Lémures, petites créatures noires aux yeux de braise grouillant autour de leurs chefs, dans une plaine chaotique sous un ciel d’orage. L’armée démoniaque était survolée par des créatures ailées, domptées par leurs sombres cavaliers, que Randall Morn supposait être des Vilsmestres.

La seconde fresque reproduite par Daril, un robuste jeune homme d’une vingtaine d’année, était beaucoup plus impressionnante pour un homme comme Randall Morn, féru d’histoire, de légendes et de mythologie divine. Une armée démoniaque, un genou à terre, rendait allégeance à leur maître. Celui-ci était représentait comme une immense créature fantomatique, flottant dans les airs et vêtue d’un long manteau capuchonné dont le bas déchiré marquait l’absence de pieds chez cette créature. Son regard couleur de lave vous pénétrait plus profondément que vous ne l’auriez voulu et vous obligeait à détourner le regard.

Randall Morn ne pouvait ignorer le symbole peint sur l’immense porte de pierre. Sa précédente conclusion avait été trop hâtive. Il s’était emballé face à l’extraordinaire découverte des jeunes aventuriers qui l’avaient amené ici. Si l’être fantomatique était bien Esus, sa valeur serait inestimable car elle serait la première représentation d’un des neuf puissants esprits dévoués au Dévoreur. Mais Randall Morn devait rester prudent et trouver d’autres indices étayant sa théorie. Il estimait que les deux fresques n’avaient pas révélé tous leurs secrets.

Tout à coup, il s’arrêta net au-dessus d’un squelette. Il se pencha prudemment, sortit une petite pince de sa besace et se saisit délicatement d’un bout de tissu. Sûrement le reste d’un uniforme. Il l’observât un moment et se redressa un sourire triomphant sur les lèvres.

- Vert et or ! S’exclama-t-il intérieurement. Les couleurs des Ecailleux. Il ne s’était pas trompé. C’était bien des combattants d’élite qui étaient morts dans ce sanctuaire. Ils formaient la plus ancienne et la plus puissante des légions hobgobelines et ils étaient toujours restés fidèles à leur roi et sa famille pendant les troubles qui avaient déchirés le Royaume de Isles. Randall Morn jubilait. S’il pouvait maintenant trouver le symbole des Ecailleux parmi les vestiges des légionnaires, il serait comblé.

Mais soudain un léger chuchotement parvint à ses oreilles. Intrigué, il se tourna vers l’immense porte de pierre. Il était presque sûr que le murmure venait de cette direction. Il attendit quelques secondes, accroupit au-dessus des restes squelettiques d’un légionnaire, à l’écoute du moindre bruit. Mais il ne perçut que le bruit du fusain grattant sur les parchemins de ses apprentis.

Randall Morn soupira. Son imagination lui jouait des tours. Il devait être fatigué. Son enthousiasme dans ses recherches lui faisait souvent oublier de se reposer.
Il se releva et se dirigea vers ses apprentis et posa la main sur l’épaule de Simon.

- Cela suffit pour aujourd’hui les garçons. Allons manger un morceau et dormir un peu. Nous attaquerons de plus belle demain une fois reposés.