Tant de colère ?!

Assise à son bureau, une plume à la main, sœur Sarah met à jour les effectifs du nouvel orphelinat.

On frappe à sa porte. Elle relève la tête, et son visage s’illumine lorsqu’elle voit Syrio, resplendissant dans son uniforme des dragons noirs, debout dans l’encadrement de la porte. Elle se lève de son bureau et vient l’embrasser. Puis, elle le regarde, il lui sourit mais son regard reste crispé. D’un geste affectif, elle lui caresse la joue :

- Quelque chose te préoccupe, mon aimé ?

Syrio s’assoit en soupirant et lui raconte son étrange expérience dans le temple de Cérès. Durant tout ce temps, Sarah reste calme malgré la multitude de questions qui se bousculent sur ses lèvres au fur à mesure du récit de son fiancé.

Syrio conclut et la regarde, attendant une réponse. Sarah reste pensive. Machinalement, elle remet une mèche rebelle derrière son oreille, prend une grande inspiration et commence :

- Tu viens de faire une rencontre des plus étranges mais je te rassure, tu n’es pas le premier. Depuis une dizaine d’année, d’autres personnes, parmi les fidèles de Cérès, ont aperçu cet étrange groupe. Beaucoup pensent que la petite fille serait une réincarnation de Cérès et qu’elle annoncerait l’avènement de temps nouveaux. Mais jusqu’à maintenant personne ne lui a parlé suffisamment longtemps pour vérifier cela. Elle semble apparaître et disparaître comme par enchantement.
Je reste persuadée en tout cas qu’elle est une manifestation de notre déesse bien-aimée et qu’elle a voulu te délivrer un message. Le tout maintenant, c’est de savoir lequel. Je pense que tu pourras sûrement y répondre mieux que moi.
Quant aux cinq moines enkites, on n’en sait pas beaucoup plus sur eux. Les gens disent simplement que trois d’entre eux se ressemblent beaucoup, comme des frères ou en tout cas des membres de la même famille. Ce détail insignifiant au prime abord peut être relier à une légende qui circulent sur cinq héros dont trois d’entre eux étaient des frères. D’après toujours la légende, ils auraient combattu une puissante secte malfaisante, certains disent liée au Dévoreur, et auraient sauvé une jeune âme de la damnation. Voilà tout ce que je sais.

Sarah se lève et se rapproche de son aimé. Elle se tient debout à côté de lui et lui passe affectueusement la main dans ses cheveux blonds.

- j’espère que j’ai pu répondre à toutes tes questions ? lui demanda-t-elle.

Syrio méditait depuis un long moment, concentré sur ses prières, attendant un signe de la déesse. La chapelle était silencieuse. Il était seul dans l’édifice.
Un murmure se fit entendre. Puis, il grandit et se transforma en un rire cristallin. Un rire de petite fille, joyeux et chaleureux.
Syrio, décontenancé, se retourna et scruta la pièce. Personne. Le rire venait de toutes les directions et semblait se réverbérer sur les murs. Impossible de trouver sa source.
Puis, les murs commencèrent à disparaître ainsi que le sol sous ses pieds, laissant Syrio, assis sur son banc, flotter dans un lieu sombre et infini. Le banc disparut à son tour et Syrio se mit à tomber, de plus en plus vite vers des abîmes sans fond …

… Il se trouvait assis dans une taverne du Bord de Faille. En face de lui, se tenaient les trois frères. Coren, la tête dans ses bras, somnolait sur la table qu’ils occupaient, tandis que Morvan se curait les ongles avec sa dague et qu’Amras sirotait une bière gnome. Ils attendaient Lorgan, partit se renseigner sur les Félons et leur cachette. Le mage prenait son temps et Lucas commençait à perdre patience. Il se leva agacé et se dirigea vers une des fenêtres et regarda vers l’extérieur.
La taverne dominait la Faille, une grande partie construite dans le vide. Chaque fois qu’il s’approchait de son bord, il avait l’impression que le plancher allait plier sous son poids.
La vue était splendide par cette belle mâtinée d’été. Il distinguait de l’autre Bord, les maisons accrochés aux parois de la Faille. Lucas pouvait voir aussi les mineurs, esclaves des Maîtres de Déchirure, qui grouillaient dans les galeries ouvertes et sur les échafaudages précaires construits en bois. D’ici, il ne pouvait voir l’immense cascade qui tombait du haut du Plateau et qui s’écoulait dans les Entrailles de la Faille. Mais il entendait le bruit de sa chute et il savait quel enfer c’était pour les pauvres bougres condamnés à travailler dans les Entrailles.
Lorgan commençait à trop tarder à son goût. Il n’aurait peut-être pas du partir seul.
Il était allé voir l’Oracle, une vieille sorcière enchaînée par les Maîtres dans un sanctuaire, loin la lumière. On venait la consulter pour connaître l’avenir. Mais la connaissance avait un prix. Une malédiction accompagnait chacune de ses prédictions. On ne savait d’où elle venait, ni quel âge elle pouvait avoir. Les humains et les gnomes l’appelaient l’Oracle mais les esclaves orques, eux la nommaient Usul, Celle-Qui-Sait.
La porte de la taverne s’ouvrit et un Lorgan à l’air fatigué pénétra dans la salle commune. Il prit une chaise à côté de Morvan et s’assit.
Il regarda Lucas s’approcher d’eux et déclara :

- Les gars, J’ai une bonne et une mauvaise nouvelle ! La bonne, c’est que je sais où est l’Enfant mais la mauvaise est qu’il va falloir descendre pour aller la chercher …

… Syrio sortit de cet étrange rêve, toujours assis sur son banc, se demandant ce qu’il avait bien pu se passer.

la haute prêtresse de Cérès écoutait attentivement les visions du jeune Syrio. lorsqu'il eut fini, elle le regarda un long moment et un léger sourire énigmatique apparut sur ses lèvres « aucun évènement spécial n'est arrivé dans votre vie, ces dernières semaines qui pourrait nous mettre sur la voie ? Réfléchissez-bien !»